Histoire du château de Fontaine-Française

De la forteresse à la demeure de plaisance

     Au Moyen Âge

         Les archives conservées au château et étudiées par R.-E. Gascon à la fin du XIXe siècle permettent d'approcher la structure médiévale de l’ancien château fort, assez caractéristique de l'architecture militaire du début du XIIIe siècle : enceinte avec tours d'angle, donjon (ou tour maîtresse, intégrée ici à l'enceinte), courtines crénelées, bâtiments adossés aux remparts sur la cour intérieure. Les cuisines et offices, séparés des lieux d’habitation, se trouvaient à l’est de la tour-maîtresse. Cette édification pourrait correspondre à la prise de possession de la seigneurie par Guillaume Ier de Vergy (après son mariage avec Clémence de Fouvent), mais l’existence d’une fortification antérieure est plus que vraisemblable.  Une chapelle dédiée à Notre-Dame fut fondée en 1297 à l'extérieur de l'enceinte. Son emplacement est connu, mais pas son orientation, ni ses dimensions et son ornementation.

                                          

                                                                       

            La Renaissance

            Les co-seigneurs de Fontaine-Française au XVIe siècle, le cardinal de Givry, Françoise de Longwy et l'amiral Chabot, sont l’incarnation même de la Renaissance.  Claude de Longwy,  évêque de Langres, duc et pair de France en 1528, cardinal de Givry en 1533, faisait partie des personnages les plus en vue du royaume. Sa nièce, Françoise de Longwy, tint une place tout aussi importante à la cour de France. Nièce de François Ier par sa mère, elle avait épousé en 1527 Philippe Chabot -Brion, comte de Charny, grand amiral de France et gouverneur de Bourgogne. Claude de Longwy transforma  le château vers 1540-1550. D’après les recherches de R.E. Gascon, il fit couvrir les tours et les courtines de charpentes supportant des toits de tuiles et « la tour du guet, au-dessus du pont-levis, fut élevée à plus de cent pieds de hauteur » (plus de 32 mètres). Il suréleva le bâtiment d’habitation, ajouta des ailes en retour et fit couvrir le tout de tuiles vernissées. Les éléments subsistant dans la toiture actuelle sont verts, jaunes, rouges et noires. Le motif choisi est inconnu. Le point de Hongrie, ici présenté, s'inspire de certaines réalisations dijonnaises du XVIe siècle. Le cardinal fit démolir la chapelle extérieure et intégra dans le nouveau bâtiment un lieu de prière si magnifique qu’un visiteur écrivit que « c’était un bijou à mettre dans un écrin». Celle-ci était couverte d’une voûte en  pierre cintrée, et  les armoiries du cardinal s’y trouvaient en vingt endroits différents. On remarque que les cuisines et offices restèrent dans leur annexe, à l’est de la tour d’entrée. Le château comprenait également des bâtiments de service : écuries, granges à foin et pour la dîme, pressoir, colombier (symbole de prestige), poulailler, garenne, etc., sans que l’on puisse déterminer exactement leur répartition à l’intérieur ou à l’extérieur de l’enceinte. François Ier séjourna à deux reprises à Fontaine, le 10 janvier 1534 et les 27-28 septembre 1535.                 

                                     

                                                            

           Le siècle des Lumières

       Au soir de la victoire du 5 juin 1595 sur la Ligue et l'armée espagnole, Henri IV dormit dans l'une des chambres du château fort. Le siècle suivant, marqué par une triste suite d'épidémies et de dévastations, ne fut pas propice à de grands travaux. Cependant, la Franche-Comté ayant été rattachée à la France par le Traité de Nimègue en 1678, Fontaine-Française fut relevée de son état de place-frontière et la solide fortification put s'ouvrir pour devenir une résidence d'agrément.

                                         

                                                                    

     François-David Bollioud, seigneur de Saint-Jullien, receveur général du clergé de France, décida en 1754 de transformer le vieux château fort en une plus confortable demeure de style classique. Les travaux planifiés par l’architecte parisien Souhard durèrent quatre ans, les reconstructions s’appuyant largement sur les anciens murs. Madame de Saint-Jullien y invita nombre de brillants esprits qu’elle accueillait déjà dans son salon littéraire du Faubourg Saint-Honoré, notamment Voltaire pour qui elle eut toujours la plus vive admiration et la plus sincère amitié, comme le prouve leur correspondance suivie pendant douze ans ou Madame de Staël qui aurait commencé en 1805 à Fontaine Corinne ou l'Italie, œuvre romantique mais déjà très féministe. La nouvelle construction, s’appuyant sur l'oeuvre du cardinal de Givry, se compose d'un corps de logis flanqué de deux ailes en retour sur la cour. Les fenêtres, hautes de 4,50 mètres, sont ornées de mascarons représentant des figures allégoriques. La cour a été recreusée, afin de mettre en valeur le perron et l’avant-corps central surmonté d’un fronton orné, à l’origine, des armoiries de la famille Saint Jullien, aujourd’hui de celles des Chabrillan. Un dôme domine l’édifice, équilibrant par son élan vertical l’horizontalité des façades et assurant la cohésion des volumes. Les fossés ont été comblés. En avant de l’ancien pont-levis, de belles grilles ferment un parc dans l’esprit de Le Nôtre, planté de 372 tilleuls. A l’intérieur, les pièces de réception, la salle à manger et la bibliothèque se sont inscrites dans la structure des appartements antérieurs. Cependant, l’architecte plaça la cuisine et les offices à l’emplacement de la chapelle du cardinal de Givry. Dans le hall central, un bel escalier en pierre à double rampe permet d’accéder à la longue galerie du premier étage, à l’extrémité de laquelle se trouve le nouveau lieu de prière.